En mars 2022, l’équipe de l’expédition Endurance22 annonce avoir enfin trouvé ce qu’elle était venue chercher non loin des côtes de l’Antarctique, à bord d’un navire océanographe brise-glace : l’épave de l’Endurance, reposant par plus de 3.000 mètres de profondeur, est localisée grâce à des méthodes de pointe, incluant des drones sous-marins de haute technologie. Ce trois-mâts avait quitté Plymouth plus d’un siècle auparavant, en août 1914, afin de partir à la conquête d’un pôle Sud encore quasi inexploré. Las, il se retrouvera inextricablement pris dans d’épais blocs de glace quelques mois plus tard et finira par couler en novembre 1915. Mais l’épopée de son équipage, mené par le capitaine Ernest Shackleton, est restée dans les mémoires : car sitôt son navire perdu, l’explorateur a bravé le froid et les blizzards avec cinq volontaires pour trouver de l’aide, lançant une expédition de secours qui ramènera sains et saufs tous les membres de son équipage.
Cette histoire extraordinaire a inspiré la compositrice Graciane Finzi, Karine Lethiec et son ensemble Calliopée, créateurs en novembre 2025 d’un concert-récit immersif qui plonge au cœur de l’expédition de l’Endurance. De l’aveu même de la compositrice, L’Odyssée TransAntarctic n’est « pas simplement une partition musicale mais une œuvre “video-sound-musical” intégrant une recherche acoustique dans un modèle de spectacle innovant ». La musique écrite par Graciane Finzi pour le septuor de l’Ensemble Calliopée (quintette à cordes, clarinette et accordéon) évolue en effet en contrepoint avec une bande sonore conçue par Diego Losa. Cet électroacousticien a lui-même participé à des expéditions polaires dans le cadre de projets audiovisuels. Il en retient « des silences intenses, des craquements de glace, des rencontres magiques » dans un lieu « hors du monde ».
Inspiré des écrits et des journaux de l’expédition Endurance, un texte lu par le comédien Charles Berling tisse le fil de l’odyssée. L’ensemble est rehaussé par la participation de la vidéaste Fanny Wilhelmine Derrier qui a repris les images captées il y a plus d’un siècle par le photographe de l’expédition, James Francis Hurley. Partant de là, c’est une véritable création visuelle qu’elle a élaborée, donnant corps à cette épopée et immergeant le spectateur dans le passé.
« Le récit de cette expédition nous invite 110 ans après à porter notre regard autant vers l’Antarctique que vers un exemple de dépassement de soi. Cette aventure humaine est parvenue jusqu’à nous de manière miraculeuse et représente un exemple pour nous aujourd’hui et pour les générations actuelles, pour nous projeter dans l’envie de l’action, de nous surpasser, de tenter l’impossible, de vouloir aller plus loin. »
Karine Lethiec
« Le lien entre la musique et la science, en particulier dans le domaine des sciences maritimes, révèle des interconnexions fascinantes. La musique repose sur des principes mathématiques et physiques, tels que les fréquences et les ondes sonores, qui sont également essentiels pour comprendre les phénomènes acoustiques sous-marins. Les scientifiques étudient la propagation des sons dans l’eau, ce qui est crucial pour des applications telles que la communication marine et l’exploration océanographique.
La musique électroacoustique, en particulier, illustre cette synergie. Elle combine la composition musicale avec des technologies électroniques et des principes acoustiques, en utilisant des outils tels que des synthétiseurs et des logiciels de traitement audio. L’expérimentation dans la musique électroacoustique permet aux artistes d’explorer de nouvelles formes sonores, tout comme les scientifiques découvrent de nouvelles méthodes pour étudier et comprendre l’environnement marin.
En somme, les musiques électroacoustiques et instrumentales représentent une fusion enrichissante entre créativités musicales et scientifiques avancées, illustrant comment ces deux domaines peuvent s’enrichir mutuellement, notamment dans le contexte des sciences maritimes. »
Diego Losa