Quatuor Modigliani

Vendredi 22 mars ı 20:00
Théâtre Princesse Grace
Before
19H – IMMERSION « BACKSTAGE* » JEUNE PUBLIC – Théâtre Princesse Grace
19H – IMMERSION « BACKSTAGE* » JEUNE PUBLIC – Théâtre Princesse Grace
Les « Before » et « After » sont réservés aux détenteurs d’un billet de concert

* en coulisses

20H – CONCERT - Théâtre Princesse Grace
<p>Quatuor Modigliani<br />
Amaury Coeytaux et Loïc Rio, violons<br />
Laurent Marfaing, alto<br />
François Kieffer, violoncelle</p>
1h50 avec entracte***

Quatuor Modigliani
Amaury Coeytaux et Loïc Rio, violons
Laurent Marfaing, alto
François Kieffer, violoncelle

Franz Schubert (1797-1828)
Quatuor à cordes n° 7 en ré majeur, D. 94

1. Allegro
2. Andante con moto
3. Menuetto. Allegretto – Trio
4. Presto

Felix Mendelssohn (1809-1847)
Quatuor à cordes n° 6 en fa mineur, op. 80

1. Allegro vivace assai
2. Allegro assai
3. Adagio
4. Finale. Allegro molto

***
Franz Schubert (1797-1828)
Quatuor à cordes n° 15 en sol majeur, D. 887

1. Allegro molto moderato
2. Andante un poco moto
3. Scherzo. Allegro vivace – Trio. Allegretto
4. Allegro assai

Franz Schubert et Felix Mendelssohn ont en commun d’être deux génies d’une étonnante précocité et deux virtuoses du quatuor à cordes, un genre qu’ils ont transformé en profondeur : leurs derniers opus sont de véritables drames sans paroles pour quatre archets. Le Quatuor Modigliani les réunit lors de deux concerts qui retracent leur évolution.

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À l’extrême fin du XVIIIe siècle, le théoricien allemand Heinrich Christoph Koch observe dans son Essai d’une introduction à la composition (1793) que le quatuor à cordes est le genre le plus difficile pour un musicien — « celui que seul un compositeur totalement entraîné et expérimenté, qui a déjà écrit plusieurs ouvrages, peut illustrer ». Quelques années plus tard, en 1810, le musicologue Johann Conrad Wilhelm confirme ces propos dans un article intitulé « Sur la musique de quatuor » en expliquant que la formation « demande de fortes dispositions compositionnelles ». Le genre semble alors incarner une forme quintessenciée de la musique de chambre. Les grandes séries du XVIIIe siècle — les quatre-vingts quatuors de Joseph Haydn ou les quatre-vingt-dix de Luigi Boccherini — se tarissent au profit d’œuvres plus individualisées et en nombre plus restreint. Le legs beethovénien impose de nouvelles normes : le nombre variable de mouvements, le format sans cesse changeant, la difficulté des parties individuelles, la force organique de la musique ou l’impression, pour l’auditeur, d’accomplir un voyage philosophique du début à la fin et de parvenir à des hauteurs jusque-là rarement atteintes.

Bien qu’appartenant à des générations et à des aires géographiques distinctes, Franz Schubert et Felix Mendelssohn reçoivent chacun l’héritage beethovénien et les nouvelles perspectives alors offertes au genre. Un nombre important de points communs réunit par ailleurs les deux compositeurs : une éducation de haut niveau, un milieu parental ouvert aux arts, une expérience de la musique de chambre cultivée précocement au sein du salon familial, un rythme et une puissance de travail hors du commun. Si Schubert considère préalablement le quatuor comme genre « social » et comme divertissement lié à l’intimité domestique, sa conception évolue au début des années 1820 pour le penser comme l’une des plus hautes manifestations de la musique de chambre. Mendelssohn, en revanche, fait sienne d’emblée cette vision idéalisée, estimant que la formation s’adresse à un public de connaisseurs et qu’elle implique en corollaire un haut degré de raffinement. Chacun va dès lors s’attacher à dessiner des veines spécifiques d’évolution du genre et dépasser l’héritage reçu.

Les premiers quatuors de Schubert s’inscrivent dans la tradition viennoise issue de Haydn et de Mozart. Ils en adoptent le style de conversation animée, la construction quadripartite, la justesse des proportions, le lyrisme des mouvements lents ou le raffinement du détail. À l’intérieur de ce cadre hérité, le compositeur opère quelques aménagements. Le Quatrième Quatuor (D. 46, 1813) débute par une introduction lente fondée sur des lignes chromatiques et des dissonances audacieuses. Plus qu’une allusion au Quatuor « Les Dissonances » de Mozart, cet exorde se réfère à une veine archaïsante et sévère, issue du stile antico pratiqué par Bach et ses prédécesseurs, et qui persistera tout au long du siècle.

Les relations tonales aventureuses, le goût de la surprise et l’absence de réexposition littérale dévoilent par ailleurs un esprit de fantaisie que l’on retrouve dans le Septième Quatuor (D. 94, 1812) et font de ces deux œuvres des pages difficilement classables sur le plan esthétique. Dans ce quatuor en majeur, la forme rompt en effet complètement avec les conceptions usuelles en évitant toute symétrie et en gommant les arêtes formelles trop acérées. Au caractère populaire de certains thèmes se mêle un sens exubérant de la conduite harmonique, en raison du nombre extravagant de tonalités traversées et de la célérité des modulations.

Écrits un peu plus de dix ans plus tard, les deux quatuors de la maturité, en mineur (D. 810, 1824) et en sol majeur (D. 887, 1826), dévoilent une autre manière de faire. À l’instar de ses deux dernières symphonies ou de ses ultimes sonates pour clavier, Schubert inscrit son travail dans la durée et se rapproche du temps romanesque : des proportions amples, des retours sans cesse variés d’un nombre restreint de thèmes faisant office de personnages, des transformations continues du tissu musical qui structurent le morceau d’une manière neuve car émancipée de la dialectique tonale habituelle. La construction en panneaux clos sur eux-mêmes donne l’impression de moments circonscrits dans le temps, comme si le musicien tentait d’isoler ou « d’éterniser » l’instant. Dans le Quatorzième Quatuor, le motif mélodique exposé dans la première mesure est soumis d’emblée à des répétitions variées, réitéré six fois en l’espace d’une quarantaine de mesures avec des oppositions de texture qui bouleversent la stratégie classique du développement mais aussi l’idée même de l’organisation déductive du discours classique. Le second élément contraste avec le premier par son caractère cantabile, son ton majeur et son écriture « viennoise » avec deux violons en tierces sur une basse qui stylise le chant populaire. Schubert réduit le discours à l’essentiel, ne présente aucun motif secondaire, mais instaure une dialectique entre le permanent et le mouvant, le stable et l’évolutif, dans une logique qui est également celle du Quinzième Quatuor.

Ce questionnement du temps en musique caractérise aussi les œuvres de Mendelssohn, même si les solutions offertes sont tout autres. Écrit à l’âge de 21 ans, le Quatuor op. 13 (1827) porte en épigraphe le texte et la musique d’un lied composé antérieurement : Frage (op. 9) sur une poésie du compositeur lui-même. Les vers peignent la situation d’un couple séparé géographiquement mais qui communique à travers la nuit, la lune et les étoiles, et demeure ainsi uni. La matière musicale de la mélodie innerve tout le tissu du quatuor : l’introduction lente en expose quelques dessins, l’Adagio en exploite une cellule rythmique et l’Intermezzo en cite deux fragments. Le Presto final fait, lui, office d’espace mnémonique en récapitulant des idées exposées dans les mouvements antérieurs puis en reprenant entièrement dans sa conclusion l’introduction lente de l’Allegro vivace initial. Le texte du lied figurant une scène nocturne, tout le quatuor prend dès lors l’aspect d’une fantaisie onirique où les éléments reviennent de façon aléatoire et inconsciente, à l’image du travail du rêve. Mendelssohn construit ainsi un temps musical inédit, mariant la réminiscence, la construction rigoureuse et le contrepoint le plus érudit.

Le Quatuor op. 80 comporte quant à lui des données autobiographiques. La surcharge de travail, les critiques d’une presse hostile mais surtout le décès de sa sœur Fanny, avec qui il avait partagé la même éducation musicale, assombrissent les dernières semaines de la vie de Felix Mendelssohn. Achevé au mois de septembre 1846, le quatuor sonne comme une œuvre de souffrance. Le ton agité, les conclusions sans cesse repoussées, les dissonances âpres, le contrepoint tendu, le jeu à quatre serré jusque dans le Finale, où la matière thématique paraît parfois s’évaporer, placent l’auditeur au bord de l’abîme, comme face au néant. Le quatuor semble se transformer en un journal intime.

Veine archaïsante, esprit de la fantaisie, formes mémorielles, volonté de concilier l’instant et la durée, insertion de données autobiographiques : les quatuors de Schubert et de Mendelssohn intègrent l’héritage beethovénien tout en s’en distançant, et offrent à la génération romantique des voies nouvelles que chacun saura cultiver, les auteurs révérés comme les « maîtres secondaires », tels Gernsheim, Verhulst ou Burgmüller, que notre époque commence à redécouvrir.

Jean-François Boukobza

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